
Et si on jardinait ensemble dans la ville?
Publié le 2 février 2018 / Mis à jour le 26 avril 2023 par Corine Carré
Planter, semer, récolter, partager, échanger, créer, imaginer… Bref, jardiner entre habitants d’un quartier en respectant l’environnement, c’est un peu tout ça à la fois l’idée des jardins partagés ! Dans ses jardins rien ne se paye, tout se partage. Un concept qui séduit de plus en plus de collectivités et d’habitants. En France, il en existe plusieurs centaines.
Contrairement aux jardins familiaux, ici le fonctionnement s’appuie d’abord et avant tout sur une collaboration collective.
L’histoire de ces jardins est née dans les années 70 aux Etats-Unis. Il aura fallu une trentaine d’années au concept pour débarquer chez nous ! En 1997 le réseau du Jardin dans Tous Ses Etats (JTSE) se constitue avec l’appui de la Fondation de France. A l’origine de cette création, une analyse d’études de santé publique menées dans le cadre de la nutrition et qui démontrent que les moins fortunés en diminuant la part de fruits et légumes dans leur alimentation a pour effet de développer et d’augmenter le diabète, l’obésité et les maladies cardio-vasculaires.
Issus de l’éducation à l’environnement, de l’insertion, de la recherche en sociologie, des milieux écologistes et associatifs, les fondateurs du jardin dans Tous Ses Etats souhaitent créer une dynamique d’échanges et de réflexion autour des jardins collectifs. Déjà présents sur le territoire hexagonal, ils possèdent tous des valeurs communes même si leurs objectifs sont parfois très différents. L’idée est alors de trouver une cohérence et un trait d’union entre tous, c’est de cette réflexion que naît le concept de jardins partagés made in France !
Au cœur du concept, le partage de l’espace, d’un projet, des activités et de la gestion du jardin apparaissent comme essentiels.
C’est la ville de Lille qui en 1997 accueille le premier jardin partagé français
Baptisé « le jardin des (Re)trouvailles », il a soufflé récemment ses 20 bougies en grande pompe et continue à faire la joie des habitants du quartier Moulins. Cinq ans plus tard, le droit s’en mêle et en 2003, une proposition de loi est adoptée et définit les jardins partagés comme étant des lieux créés ou animés collectivement ayant pour objet de développer des liens sociaux de proximité par le biais d’activités sociales, culturelles ou éducatives et étant accessibles au public. Une avancée législative qui permet un développement constant des jardins partagés.

Des jardins respectueux de l’environnement
Tous ont pour mission de favoriser les échanges entre les différents habitants d’un quartier tout en liant préoccupations environnementales et enjeux sociaux. C’est souvent aussi un excellent moyen d’appliquer des préceptes de développement durable de façon concrète. Lorsque des habitants s’engagent dans un projet de jardins partagés, ils s’engagent à utiliser des pratiques de culture favorisant la biodiversité sauvage et domestique en intégrant notamment une gestion écologique des cycles naturels, de l’eau et des déchets. L’utilisation de produits phytosanitaires est le plus souvent bannie dans les jardins partagés. Même s’il n’existe pas de règlement type en la matière, ces mesures de protection de l’environnement sont généralement respectées par les jardiniers qui utilisent ces parcelles cultivables.
Les habitants acteurs de leur territoire
Lieux d’expérimentation, d’innovation et de convivialité ancrés dans une démarche de démocratie participative où chacun peut s’exprimer sur le modèle de gouvernance transversale plutôt que vertical, les jardins partagés permettent aux collectivités d’intégrer les habitants dans la conception des espaces publics en leur donnant la possibilité de se responsabiliser quant à l’aménagement et surtout la gestion de ces espaces. De consommateurs d’espace, ils deviennent acteurs de leur territoire. Si la ville reste propriétaire du terrain exploité, l’association qui a permis la création du jardin partagé en a, quant à elle l’usufruit. Un bon moyen de lutter contre le bétonnage à outrance des villes et de (re)créer un tissu social parfois fragilisé.
Rencontre avec Lisa Bertrand, la « madame jardin partagé » de Gennevilliers.

Son rôle : rechercher des terrains, réaliser les plans d’aménagement avec les habitants via le conseil de quartier, suivre les travaux, accompagner le développement et la vie des jardins en proposant notamment des ateliers ou des conférences.
Quand elle ne travaille pas à la mairie, elle travaille avec les entreprises, les écoles ou encore les associations pour mettre en place des projets participatifs liés à l’environnement. Cette chargée de projets urbains durables et innovants a même créé un blog il y a un an et demi. « La ville pousse » a pour objectifs de mettre en avant les diverses initiatives des fabricants de la ville durable et de servir de source d’inspiration et de conseils pour les gouvernements locaux et les habitants souhaitant s’engager dans de nouveaux projets urbains verts et solidaires. Selon elle, « en matière de développement durable, les élus jouent un rôle très important et ont une réelle responsabilité. A Gennevilliers, cette question est vraiment prise en compte ».
Située dans la banlieue parisienne à quelques kilomètres de Paris, cette ville de 42 000 habitants compte 9 jardins partagés, dont 4 ouverts en 2016, et 3 autres dont la création est prévue en 2018. Chaque jardin réunit une quinzaine d’adhérents. Un pari vert porteur de cohésion et de mixité sociale qui place les habitants au cœur de la gestion du territoire et de l’espace.
Lisa Bertand :« En ce qui concerne les jardins partagés, je pense qu’il est indispensable de co-construire l’espace avec les habitants. En général, un projet démarre parce qu’au sein d’un conseil de quartier, il y a eu une demande. En tant que représentants de la mairie, on vient avec des propositions mais on travaille en concertation avec la population. On n’arrive jamais avec un projet clé en main, il est essentiel que les habitants s’approprient le projet puisque ce sont eux qui, par la suite, vont l’investir. Il y a un groupe qui travaille en amont sur le projet et un autre groupe qui, une fois le jardin créé, va le faire vivre et assurer sa pérennité. Ce ne sont pas toujours les mêmes personnes qui participent aux deux étapes, ça dépend, il n’y a pas de règle absolue. Le principe est de travailler à l’existence d’un lieu ouvert sur la ville qui puisse permettre de partager au cœur de la cité. Je trouve que c’est plutôt sain d’être ouvert et bien dans le patrimoine architectural. Les gens passent, regardent, il y a des interactions qui se créent. Les jardins partagés jouent un rôle très fort en terme de cohésion sociale et de rencontre de la population du fait notamment de la gestion collective qui est mise en place. C’est une bonne occasion de se rencontrer sans pour autant partager forcément les mêmes modes de vie. Ici, on parle du quotidien. Les discussions sont plutôt de l’ordre du foyer, des loisirs. Un des principaux intérêt de ce type de structure est la transmission et le partage. Dans un jardin partagé, il y a beaucoup de tâches différentes à effectuer. Chacun arrive avec ses compétences et en fait profiter les autres. Souvent, avant que le jardin naisse, les gens ne se connaissaient pas. Généralement, ils développent un rapport particulier à ce lieu. En avril 2018, il est d’ailleurs prévu l’ouverture d’un jardin entièrement ouvert sur l’espace public sans aucune clôture. Il s’agit d’un test expérimental sur lequel la mairie souhaite beaucoup communiquer auprès de la population pour éviter que le lieu devienne une poubelle ».
Pour plus d’informations, vous pouvez consulter le blog de Lisa Bertrand : www.lavillepousse.fr et le site www.partageonslesjardins.fr (pour la Région de Toulouse)
A noter bien entendu que notre site lepotiron.fr propose également l’option de jardin partagé sur toute la France.